Vu par Marcel Regamey
L’Etat jurassien de l’Ancien Régime était monarchique: le prince était le seul lien unissant Jurassiens du Sud et du Nord, de Bienne à Arlesheim. Le prince disparu, l’unité morale du Jura éclate. L’ethnie française est devenue pour le Rassemblement jurassien un ciment de remplacement, peu efficace, qui ne peut équivaloir à des frontières naturelles et à l’unité confessionnelle dont était pourvu, en 1803, le peuple vaudois libéré. Les libertés constitutionnelles et l’idéologie de l’ethnie française ne sont pour le Rassemblement jurassien que des moyens pour recréer une unité jurassienne telle que M. Béguelin l’a conçue. Cette unité n’est plus la principauté épiscopale dans sa totalité; elle va plus loin que le canton du Jura nouvellement né. A vues humaines, elle est irréalisable dans un avenir prochain. L’acquisition de Moutier n’est pas exclue un jour. Au-delà, il faudrait que le canton de Berne commette de telles erreurs qu’il provoque lui-même la sécession du Jura du Sud, dont il assure le protectorat depuis la Réforme. Il est vrai que le Piémont n’avait pas plus de chances, en 1848, de faire l’Italie.
Marcel Regamey, in
La Nation n° 1102 du 22 mars 1980.
Au sommaire de cette même édition de La Nation:
- Les Jurassiens comme exemple – Editorial, Félicien Monnier
- Sauf sur l’essentiel – Alain Charpilloz
- D’abord l’unification ou la nation? – Quentin Monnerat
- Alexandre Voisard, 1930-2024 - La dernière lettre d’un poète – Yves Guignard
- Mon pays de cerise et de légende – Eloi Chevalier
- Un magnifique armorial jurassien – Olivier Delacrétaz
- Trente glorieuses pour l’art et pour l’autonomie – Jean-Blaise Rochat
- La diversité contre les différences – Jacques Perrin
- Conseillers aux Etats centralisateurs – Jean-François Cavin
- Justin comme Donald – Le Coin du Ronchon